Où sont fabriqués les vêtements de ces 5 marques françaises : Sézane, Ba&sh, The Kooples, Zadig et Voltaire, Balzac Paris ?

Ces noms font partie des marques emblématiques françaises. Elles sont plébiscitées aussi bien en France qu’à l’étranger.

L’inarrêtable Sézane possède, en plus de ses boutiques françaises, deux appartements (ndlr : nom que la marque donne à ses boutiques) à Londres et Zurich, ainsi que trois aux États-Unis : New York, Los Angeles et Californie, avec l’ouverture prochaine d’un 4ème appartement à Washington DC. Devenue incontournable en 10 ans, la marque a réussi à s’imposer dans le dressing de la Princesse de Galles, Kate Middleton.

L’international Ba&sh possède 272 magasins répartis dans toute l’Europe, aux Etats-Unis et Canada, ainsi qu’à Singapour et en Chine.

La puissante The Kooples, qui compte plus de 90k recherches par mois, possède près de 150 boutiques en France et en Europe. The Kooples a récemment fait parler d’elle en étant la fameuse veste de Marine Tondelier. Avec une origine de fabrication incertaine, la députée les Verts a fini par la troquer contre une veste en coton fabriquée en France de la marque Ombelline.

La très parisienne Zadig et Voltaire compte 20 points de vente uniquement à Paris, dont 5 boutiques en propre et un réseau de distribution au BHV, Le Bon Marché et les Galeries Lafayette. Elle est également présente au Japon, en Corée du Sud et Hong Kong, ainsi que Milan et Londres.

Enfin, celle qui se présente comme éco-responsable, Balzac Paris, est présente uniquement en France et en Suisse, avec 3 boutiques parisiennes, une annécienne et une genevoise.

Pour rappel, une marque française ne signifie pas que la production est fabriquée en France. Cela signifie simplement qu’elle est française par la nationalité de ses fondateurs et/ou parce que la marque est domiciliée en France. Par exemple, Veja est une marque française. Elle a été fondée par deux français, Sébastien Kopp et François-Ghislain Morillion, et son siège social est installé rue du Faubourg Poissonnière dans le 10ème arrondissement de Paris, avec un n° de TVA français. Pourtant Veja fait fabriquer ses baskets principalement au Brésil et quelques modèles au Portugal. Ce n’est donc pas une fabrication française.

Où sont fabriqués les vêtements de Sézane ?

Elle a fondé Sézane seule, gérée depuis en toute indépendance avec une croissance naturelle (sans fond d’investissement), Morgane Sézalory est entrée dans le monde de la mode grâce à la seconde main.

En 2008, elle lance Les Composantes, une boutique en ligne, où elle revend des pièces qu’elle a chinées et/ou retravaillées elle-même. Forte de son succès, cinq ans plus tard, Les Composantes devient Sézane, la contraction d’une partie de son nom et prénom (Morgane Sézalory).

Sézane renvoie cette image du chic à la française, de cette femme active et élégante. Elle est le Petit Poucet face aux mastodontes ba&sh, The Kooples, Zadig et Voltaire, Balzac Paris. Pourtant, elle est celle qui croit à son rythme, malgré l’inflation et arrive à s’imposer dans les dressings des têtes couronnées, de Kate Middleton à Madeleine de Suède.

Les engagements responsables de la marque se concrétisent par une certification B Corp et le statut de société à mission obtenus en 2021. Sézane revendique également que les 3/4 des matières de toutes ses collections sont écoresponsables dans le sens où 90% du coton est issu de l’agriculture biologique, 85% de la viscose provient de forêts gérées durablement (cependant il n’est pas précisé si les forêts sont certifiées PEFC ou FSC), plus de 50% de la laine utilisée est recyclée ou certifiée RWS et 100% mulesing free, enfin plus de 80% du tannage des cuirs est réalisé de façon responsable (pas plus de précision non plus, sachant qu’un tannage minéral, au chrome, réalisé au sein de l’Union Européenne est très encadré donc responsable par défaut).

Sur son site, Sézane indique que les 2/3 des produits sont fabriqués en Europe, le reste est sous-traité en Inde, en Chine, à Madagascar… Toutefois, la proportion réalisée en France est méconnue, voire totalement absente. En affichant une dizaine de produits, je n’ai aperçu aucune fabrication française. L’étape de fabrication ou confection textile (à ne pas confondre avec conception pour parler de la création du produit) est indiquée sur les fiches produits, dans l’onglet “Détails et Compo”.

Où sont fabriqués les vêtements ba&sh ?

Où sont fabriqués les vêtements The Kooples ?

Derrière The Kooples se cachent 3 frères : Alexandre, Laurent et Raphaël Elicha. Si ce nom ne vous dit rien, leurs parents étaient les fondateurs de la marque Comptoir des cotonniers.

La marque se positionne comme acteur d’une “mode plus durable et plus responsable” et de vouloir  “prolonger la durée de vie de nos produits et de construire, avec vous, une économie circulaire“. Cela se traduit par la création d’une plateforme de seconde main sur leur site web baptisée Second Love. Elle permet à leurs clients de revendre et d’acheter des articles The Kooples d’anciennes collections. Les articles sont authentifiés et nettoyés par la marque elle-même. À noter que de plus en plus de marques développent leur propre univers de seconde main (de Kiabi à Veepee, en passant par The Kooples, Sézane…) sûrement avant tout pour concurrencer Vinted et gagner des parts de marché sur le secteur de l’occasion.

Sur les 5 marques citées dans cet article, The Kooples est celle qui complique le plus l’accès à l’information pour connaître l’origine de fabrication. Il faut naviguer dans la fiche produit, ouvrir l’onglet “engagement” et pas celui “origine” pourtant plus instinctif, puis encore lire le paragraphe pour savoir qu’il faut “cliquer ici”. Enfin, on découvre que le t-shirt est fabriqué en Inde pour être vendu 85€. D’autant plus que cet onglet “engagement” n’est pas disponible pour l’ensemble des articles mis en vente sur leur site.

The Kooples est celle qui communique le moins sur les pays de confection de leurs pièces. On a littéralement aucune info sur les pays fabricants leurs vêtements et accessoires.

Où sont fabriqués les vêtements de Zadig et Voltaire ?

Arrière petit-neveu du co-fondateur de Lacoste, Thierry Gillier lance Zadig & Voltaire en 1997, avec le crédo de “détourner avec impertinence les codes du luxe“. Dans leur collection iconique, on retrouve des pièces rock, à la fois chics et désinvoltes.

Dans ses engagements, notamment à horizon 2025, la marque veut une traçabilité exhaustive de tous ses produits et 100% de matières premières clés certifiées, issues de filières durables ou à impact environnemental réduit. Les certifications visées ne sont toutefois pas énoncées. Quant aux éléments de langage utilisés, quelle est la différence entre une “matière première clé” d’une matière première.

Parallèlement, la marque indique avoir rejoint en 2021 le pacte mondial des Nations Unies, “s’engageant ainsi à soutenir et à promouvoir à travers ses activités, ses 10 principes relatifs aux droits humains, aux normes internationales du travail, à l’environnement et à la lutte contre la corruption“.

Actuellement, la traçabilité est déjà bien au rendez-vous sur les fiches produits. Toutes les étapes de fabrication sont détaillées dans l’onglet “caractéristiques environnementales”.

Par contre, Zadig et Voltaire ne communique pas globalement sur l’origine de fabrication des vêtements. Il faut regarder individuellement chaque produit, pour voir les origines de confection en Chine, à Madagascar, à l’île Maurice, Tunisie… D’ailleurs, Najat Vallaud-Belkacem avait créé un tollé avec sa veste Zadig et Voltaire qu’elle pensait made in France (parce que marque française), alors qu’Arnaud Montebourg défendait, à la même période, la fabrication française en marinière made in France.

Où sont fabriqués les vêtements de Balzac Paris ?

Fondée en 2014 par Chrysoline De Gastines, Victorien De Gastines et Charles Fourmaux, dès le départ, Balzac Paris se veut “pionnière en matière de mode durable“.

Se définissant comme éco-responsable, la marque le justifie en :

• ayant réalisé le bilan carbone de son activité en 2022, via l’Association pour la transition Bas Carbone (ABC). Il s’élève à un total de 1 695 tCO2eq/an. Cependant sans point de comparaison, il est difficile de savoir si c’est beaucoup ou pas.
• toujours en 2022, Balzac Paris est devenue une société à mission et développe la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).
• en produisant 90% (en nombre) de leurs références dans l’Union Européenne, et 11% (en volume) en France. On peut se demander la raison du changement d’échelle entre la production européenne et française. En tout cas, l’app Clear Fashion annonce 8% de confection française.
• en proposant de la “seconde vie” sur leur site e-commerce (comme à peu près tout le monde dorénavant)

Balzac explique également sur son site internet que “Le choix de nos partenaires est essentiel pour garantir une mode T.P.R (Toujours Plus Responsable) à nos clientes. ” Les exemples donnés concernent :

• leurs espadrilles fabriquées par un atelier labellisé Entreprise du Patrimoine Vivant en Pays-Basques,
• l’utilisation de la laine française via leur implication au sein de l’association du Collectif Tricolor (dont Balzac Paris est l’un des membres fondateurs) qui a pour objectif de développer la filière laine en France.
• la réalisation de textiles imprimés par l’entreprise lyonnaise Deveaux (EPV), spécialiste de l’impression sur textile et teintures (tissage et tricotage).

L’origine de fabrication est écrite et facilement identifiable sur la fiche produit.

Que peut-on conclure ?

Si vous trouvez que l’article manque de tranchant, c’est tout à fait normal 🙂 Nous jugeons uniquement l’origine de fabrication des produits. D’une part, car c’est le principe de notre site Marques de France et, d’autre part, parce que le marquage d’origine est encadré par la législation.

Pour juger de ce qui est responsable et/ou durable, il n’y a pas de texte de loi. Hormis la RSE (qui répond à la norme ISO 26000) et le principe d’entreprise à mission (régi par le décret n°2020-1), qui définissent un cadre avec des audits effectués par un organisme tiers indépendant. Les termes “durable et responsable” restent à l’appréciation de chacun. Par exemple, le polyester recyclé est pour certains considéré comme une matière écologique puisque recyclé et pour d’autres, il est non durable car le polyester recyclé reste du plastique et peut, lors des lavages en machine, relarguer des microparticules.

De plus, lorsque les marques annoncent vouloir assurer la traçabilité de la chaîne d’approvisionnement de leurs produits, ce n’est pas un acte volontaire d’écoresponsabilité. Elles se mettent simplement en adéquation avec la loi AGEC, entrée en vigueur au 1er janvier 2023 pour les entreprises réalisant plus de 50 millions d’euros de CA, différée au 1er janvier 2024 pour celles réalisant 20 millions et 2025 pour celles réalisant plus de 10 millions d’euros (décret n°2022-748 du 29 avril 2022).

Autres questions que nous vous laissons trancher :

• est-ce qu’une marque qui favorise son propre circuit parallèle de seconde main (achat/revente de seulement leurs produits) peut se dire écoresponsable ?
• est-ce qu’une marque qui relocalise en Turquie, au Maghreb et Europe, mais pas en France, peut se dire écoresponsable ?
• est-ce qu’une marque positionnée sur le haut de gamme, donc avec des prix relativement élevés, peut se dire écoresponsable alors qu’elle fait fabriquer en Inde, en Chine, à Madagascar…
• est-ce qu’une marque qui ne produit pas en France peut-être écoresponsable ?
• ….

En tout cas, si vous avez déjà acheté chez l’une de ces 5 marques, le made in France est totalement à votre portée !