Incubée au sein du groupe Happychic (Jules, Pimkie), La Gentle Factory raconte sa prise d’indépendance et sa nouvelle collab’ avec Promod
Lorsqu’elle a créé La Gentle Factory, Christèle Merter, ingénieure textile de formation, travaillait encore pour l'enseigne de prêt-à-porter pour homme Jules (groupe Happychic devenu Fashion Cube). Aujourd’hui, La Gentle Factory fédère plus de 30 ateliers français pour la confection de ses vêtements : du tricotage à la teinture, en passant par la fabrication des boutons. Présente au salon MIFEXPO, la fondatrice de la marque a répondu à nos questions.
“En 2013, j’en ai eu marre de me déplacer en Asie et j’avais l’impression de cautionner un projet qui ne correspondait pas à mes valeurs”. Ainsi quand Christèle Merter a l’opportunité de créer La Gentle Factory, en 2013, au sein du groupe Happychic sous la forme d’intrapreneuriat, elle saisit sa chance.
Après 5 années d’incubation au sein du groupe nordiste de prêt-à-porter connu pour distribuer les marques Jules, Pimkie, Bizbee, Rouge-Gorge ou encore Grain de Malice, La Gentle Factory réalise que son modèle économique et ses systèmes d’information et de logistique sont aux antipodes de ceux de sa maison mère. La Gentle Factory prend ses distances et s’oriente vers un modèle d’enseigne multimarques et de vêtements made in France promouvant une consommation responsable, sans cette étiquette de grande distribution qui lui collait à la peau.
“Vouloir être distribuée dans un écosystème de concept stores multimarques indépendants partout en France” était la bonne décision pour la Présidente qui prend son envol définitif en 2019 quelques mois avant le début de la pandémie liée au SARS-COV2.
Avez-vous l’impression que la période de COVID et ses confinements successifs ont fait évoluer les mentalités avec cette prise de conscience généralisée de notre dépendance aux produits asiatiques ?
“Si vous m’aviez posé la question il y a deux ans, en 2021, à la sortie du COVID, je vous aurai répondu que les mentalités avaient changé et que ça a été un véritable accélérateur. Mais finalement, quand l’inflation revient et que la question économique des ménages devient vitale, le prix reste l’élément déterminant. Nous, comme tant de marques, accusons une baisse de chiffre d’affaires. C’est le signe que les consommateurs arbitrent leurs dépenses en défaveur du textile fabriqué en France.”
Depuis quand le made in France vous intéresse ?
“Très honnêtement le made in France n’était pas le premier critère recherché. Pour remettre dans le contexte, La Gentle est née d’un échec commercial où on a récupéré des vieux jeans de chez Jules qu’on a transformé en matière première pour en faire des fils servant à tricoter de nouveaux pulls. Quand on s’est posé la question où réaliser la production afin que l’impact environnemental soit le plus faible, la France est devenue une évidence. Cela aurait été ridicule d’envoyer les bobines en Asie pour faire revenir les produits en France.
Le made in France est l’un des piliers de la responsabilité de La Gentle Factory. D’ailleurs, notre nom qui signifie “Usine Douce” en anglais ne reflète pas la fabrication française mais notre volonté première de produire de manière raisonnable et responsable.
Nous réalisons un vrai travail de pédagogie et d’accompagnement de nos clients et futurs clients pour qu’ils comprennent que le fabriqué en France permet de financer notre système social, avec l’intention d’acheter moins et mieux, ainsi que de proposer des produits aux tarifs plus compétitifs avec cet objectif d’avoir une TVA réduite.”
Vous avez récemment racheté les deux boutiques parisiennes de la marque Adresse Paris, quel est l’objectif ?
“Depuis sa création, la force de La Gentle Factory est le dicton : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. Ainsi La Gentle offre une gamme casual très cotonnière. En rachetant Adresse Paris, on a une marque complémentaire avec un ADN très marqué. Elle a un savoir-faire des pièces techniques : des matières déperlantes, respirantes, chaudes et élégantes comme le manteau Elon. Utiliser les compétences des uns et des autres, plutôt que de recommencer de zéro la création d’une collection est notre crédo.
Le nom de la marque Adresse reste. Seul le nom des magasins changent pour La Factory. Ces lieux accueilleront les collections de La Gentle et d’Adresse. Bientôt de nouvelles marques qui fabriquent en France viendront enrichir le dressing. Par exemple, une chaussure est en développement avec Sessile.”
C'est quoi le futur de La Gentle Factory ?
“On doit évoluer et s’adapter. On veut devenir une marque de mode régénérative. On ne parle plus de compensation carbone, on parle de réparer les dommages causés sur l’environnement en devenant une plateforme qui connecte les acteurs de la mode responsable. D’où l’idée de La Factory et ses deux lieux de ventes parisiens.
De plus, le rachat de la marque Adresse nous a permis d’envoyer des signaux positifs à nos clients et nos fournisseurs. Malgré le contexte, la marque résiste.
Pour grandir et se pérenniser, je crois beaucoup à la personnalisation des vêtements : des vêtements qui me conviennent et dont j’ai besoin. Par exemple, on est actionnaire des 3 tricoteurs basés à Roubaix, lesquels tricotent des pulls à la demande en fonction de l’envie du client.
Enfin, je garde une appétence pour le textile et tout ce qui s’en rapproche comme le linge de maison. Ce sont des produits qui seront peut-être développés, en intégrant de la recyclabilité et de la réparabilité. D’ailleurs, notre dernière collab’ avec Revive Clothing Lab a très bien fonctionné. On a repris des sweats qui trainaient chez notre sérigraphe car ils n’avaient plus les bonnes couleurs, plus la bonne coupe, et Revive les a remixés donnant des sweats surprenants qui ont cartonné.”
Est-ce que vous entretenez encore des liens avec la grande distribution ?
“Nous avons réalisé une collab avec Promod qui sort le 20 novembre 2023. Je l’attends avec impatience car on a fait de très beaux produits avec une marque de grande distribution qui a joué le jeu à fond et qui a réellement écouté nos contraintes et nos problématiques. Les premiers retours ont été très positifs, à l’image de La Gentle : innovant, durable et chaleureux.”
Contenu rédigé par Baptiste Chuzeville
Fraichement diplômé d’un bachelor Journalisme au sein de l’ISCPA de Lyon, qu’il avait terminé par un stage de 5 mois au sein de notre rédaction, Baptiste s’est dirigé vers un master à l’ISFJ Lyon. Aujourd’hui alternant, il alimente la page magazine du site.