Fast fashion : on vous explique tout !
Un mode de production express, aux lourdes conséquences écologiques et humaines. On vous explique ce qu'est la fast fashion.
Table des matières
La fast fashion : définition
La fast fashion se traduit littéralement par « mode rapide ». Ce concept définit une mode jetable ou éphémère, basée sur plusieurs principes :
- les collections de vêtements sont sans cesse renouvelées, jusqu’à plusieurs fois par semaines, pour coller aux tendances ;
- la production est effectuée en masse, sans se soucier de la qualité des vêtements ;
- les pièces sont vendues à très bas prix ;
- les vêtements sont peu portés, jetés rapidement par les consommateurs.
Le tout conduit à favoriser la surconsommation et à faire de l’industrie textile l’une des plus polluantes au monde.
La fast fashion s’oppose à la slow fashion, ce mouvement qui se veut plus éthique et durable, que l’on retrouve par exemple chez certaines marques produisant en France.
D’où provient la fast fashion ?
Les débuts de ce modèle économique
La fast fashion a transformé le modèle économique de la mode, en profitant de la mondialisation. Avant les années 50, dans les foyers les plus modestes, les vêtements étaient portés jusqu’à l’usure. Ils avaient un rôle utilitaire plus qu’esthétique. Un soin particulier était toutefois donné aux « vêtements du dimanche », dédiés aux grands événements. L’achat de vêtements de façon régulière était alors un luxe réservé aux classes aisées.
La démocratisation du prêt-à-porter intervint dans les années 70-80. En France, des marques comme Naf Naf, Camaïeu ou Jennifer sont ainsi arrivées, rendant les vêtements plus accessibles et favorisant leur renouvellement. Les enseignes sortaient alors 2 collections par an : printemps-été et automne-hiver.
Le concept de fast fashion a ensuite été lancé au début des années 90, dans les grandes villes iconiques de la mode comme New-York ou Londres. En Europe, c’est l’implantation de marques comme Zara, H&M ou Topshop qui ont été les précurseurs. Le fondateur de Zara, Amancio Ortega, est d’ailleurs considéré comme le père de la fast fashion. Il bâtit son empire en fabriquant des robes inspirées de modèle haute de gamme, mais vendues à prix bas pour être accessibles au plus grand nombre (source : Les Echos et BeaBoss). Pour cela, il réduisit le nombre d’intermédiaires entre le processus de fabrication et la mise en vente, ce qui permit également de gagner en réactivité. Les stocks étaient alors plus fréquemment renouvelés (jusqu’à 20 collections par an) et des nouveaux modèles rapidement créés, pour répondre à un prétendu besoin de consommateurs.
Le modèle de la fast fashion a ensuite été suivi par de nombreuses autres marques dans les années 2000. Aujourd’hui, nous parlons même d’ultra fast fashion, avec des marques qui proposent chaque jour des nouveautés. Certaines vendent leurs produits uniquement en ligne et non plus en magasins physiques, à l’instar de Shein.
Les lieux de production
Ils sont situés dans des pays dits en développement, dans lesquels la main d’œuvre est peu coûteuse, principalement en Asie (Bangladesh, Pakistan, Thaïlande, Turquie, Inde, Vietnam, Indonésie, Chine…).
Les marques fast fashion
Les principaux acteurs de la fast fashion, côtés en bourse, sont les groupes :
- le groupe Inditex qui détient Zara, mais aussi Pull and Bear, Massimo Dutti, Bershka, Stradivarius, Oysho…;
- le groupe H&M qui possède également Monki, Weekday, & Other Stories, Cheap Monday…
- le groupe Fast Retailing qui réunit : Uniqlo, Comptoir des cotonniers, Princesse Tam Tam.
On peut citer également :
- le groupe Chinois Pinduoduo qui gère l’application Temu, présentée comme le paradis des bonnes affaires mais décriée pour ses méthodes marketing agressives et la pression exercée sur ses fournisseurs ayant un impact sur les conditions de travail
- le groupe Boohoo : NastyGal, PrettyLittleThing…
- et bien évidemment Shein dont on parle de plus en plus.
Les techniques marketing de la fast fashion
Le terme fast fashion est uniquement utilisé dans l’univers du prêt-à-porter, même si cette production sans cesse renouvelée et peu chère existe dans d’autres secteurs (décoration, cosmétique, high-tech…). Elle concerne donc les vêtements pour femmes, hommes et enfants.
Valoriser la surconsommation en créant un sentiment d’urgence
Pour faire acheter toujours plus de vêtements aux consommateurs, la fast fashion utilise des techniques de neuromarketing, c’est-à-dire basées sur les sciences cognitives et l’analyse des comportements d’achat.
Elle produit des stocks en quantité limitée, qui ne restent que peu de temps en rayon, et qui copient les dernières tendances de défilés de mode et marques de luxe. L’objectif est de stimuler l’envie et le sentiment d’urgence chez les clients, afin de déclencher l’acte d’achat de manière compulsive. L’idée est de véhiculer le message que le consommateur passe à côté d’une bonne affaire s’il n’achète pas et, par extension, qu’il se prive d’un plaisir certain. Les marques créent aussi des collections capsules avec des personnalités publiques, issues de la mode ou non. Elles se composent de pièces en séries limitées, qui accentuent ce sentiment d’exclusivité et le désir d’achat.
Les produits étant à bas prix, il n’est plus nécessaire d’attendre les périodes de soldes pour renouveler sa garde-robe. Le pouvoir d’achat des ménages semble ainsi augmenté, d’autant qu’il existe désormais toute l’année d’autres moyens d’afficher des prix encore plus bas : ventes privées, ventes flash, déstockage, Black Friday, codes promos, etc.
L’investissement dans la publicité (télévision, affichage, internet) et les partenariats, notamment avec les influenceurs mode sur les réseaux sociaux, représentent une grosse part du budget de la fast fashion. Les fameux « hauls », ces achats que l’on vient de réaliser et que l’on expose en vidéo, existaient déjà sur YouTube. Mais ils se multiplient désormais sur Instagram et TikTok, permettant de toucher une cible parfois très jeune.
Miser sur le greenwashing
De plus en plus de consommateurs sont sensibles aux enjeux environnementaux et sociaux. Mais la fast fashion et ses conséquences sont régulièrement dénoncées. Pour continuer à répondre aux attentes de leurs clients, beaucoup de marques tentent donc de redorer (ou reverdir) leur image, en utilisant les mécanismes du greenwashing. Ce procédé consiste à mettre en avant des arguments écologiques, qui ne correspondent pas à la réalité des faits. Packaging trompeur, label créé de toutes pièces, manque de transparence… autant d’outils utilisés pour construire une image trompeuse. Les collections capsules, vantées comme « écologiques » ou « écoresponsables », en sont de parfaits exemples.
Quels sont les avantages de la fast fashion ?
Des vêtements à prix bas
Il s’agit de l’argument principal en faveur de la fast fashion : les vêtements sont bon marché, vendus à prix très attractifs. Cela permet donc à quasiment toutes les bourses, même les plus modestes, de s’habiller. Les jeunes et les étudiants font d’ailleurs partie des cibles privilégiées de la fast fashion.
Une démocratisation de la mode
La fast fashion s’inspire des vêtements présentés dans les défilés de mode, pour produire des copies accessibles au plus grand nombre. Cela permet encore une fois aux foyers même modestes de pouvoir suivre et porter les tendances, participant ainsi à démocratiser la mode.
Un large choix de tailles
Le panel de tailles disponibles pour un vêtement peut grandement varier selon les marques, du XS au XXXL. Or, les personnes s’habillant en « plus-size » (terme utilisé généralement à partir d’une taille 44-46) trouvent dans la fast-fashion un plus grand choix de vêtements que chez la plupart des enseignes, même jugées éthiques et inclusives. De nombreuses lignes de vêtements dédiées existent ainsi chez H&M, Asos (gamme « Curve ») ou Shein (jusqu’à la taille 68).
Quels sont les inconvénients et limites de la fast fashion ?
Humains, sanitaires, environnementaux… les impacts négatifs de la fast fashion sont multiples. De nombreuses ONG, associations ou personnalités publiques œuvrent pour les mettre en lumière, afin de responsabiliser les grandes entreprises textiles et de promouvoir la création de lois plus protectrices.
Un modèle néfaste pour l’environnement
La fast fashion a un impact négatif sur l’environnement à de nombreux niveaux. Au total, l’industrie textile émet 4 milliards d’équivalent CO₂ par an. C’est plus que ce qu’émettent le transport aérien international et le trafic maritime réunis.
Des matières premières polluantes
Pour pouvoir produire à bas prix, les industriels utilisent des matières premières peu coûteuses, mais très polluantes. C’est le cas avec le polyester, le polyamide (nylon) ou l’acrylique, qui sont issues d’énergies fossiles donc non renouvelables.
Le coton, bien que naturel puisqu’il est extrait d’une plante, est également beaucoup utilisé. Or, sa culture intensive nécessite beaucoup de produits chimiques et de consommation en eau.
Enfin, les matières animales sont également exploitées (cuir, laine, fourrure), souvent dans le cadre d’élevages intensifs polluants et maltraitants.
Une forte exploitation des ressources naturelles
L’industrie textile est le 3ème secteur le plus consommateur d’eau dans le monde, après les cultures de blé et de riz. L’eau est en effet essentielle pour la culture de matières premières d’origine naturelle, mais aussi tout au long de la chaîne de production (transformation, teinture, prélavages, etc.).
De nombreux produits chimiques utilisés
Teintures, décolorations, fixation des couleurs… autant d’étapes qui nécessitent l’utilisation de nombreux produits chimiques nocifs pour l’environnement. C’est le cas des phtalates, des colorants azoïques, ou encore du formaldéhyde (substance cancérigène). Ces produits sont rejetés par les usines directement dans l’environnement, polluant les nappes phréatiques et les cours d’eau. Ainsi, 20% de la pollution des eaux dans le monde serait issue des teintures et traitements imputables à l’industrie textile.
Des transports qui augmentent encore l’empreinte carbone
La plupart de nos vêtements proviennent des pays asiatiques. Mais toutes les étapes de production ne sont pas forcément réalisées dans le même pays. Ainsi, un simple jean peut parcourir jusqu’à 65 000 km, soit 1 fois et demi le tour de la Terre, avant d’arriver dans nos dressings.
L’avion est le moyen de transport privilégié, puisqu’il est plus rapide. Mais il génère davantage de gaz à effet de serre, responsables du dérèglement climatique.
Des lavages qui génèrent une pollution supplémentaire
Ce sont tout d’abord les produits chimiques utilisés lors de la confection qui sont rejetés lors des lavages. Mais avec les matières synthétiques, une autre pollution pose problème. Des microparticules de plastique trop fines pour être filtrées par les stations d’épuration sont rejetées dans les cours d’eau. Elles constituent la principale source de pollution des océans, devant celle des sacs en plastique.
Un gaspillage monumental
Selon une étude Novethic de 2019 sur le gaspillage vestimentaire, 100 milliards de vêtements sont produits chaque année, alors que nous ne portons que 30% de notre garde-robe (soit environ 114€ d’habits qui ne sont jamais utilisés).
80% des vêtements que nous ne voulons plus sont jetés aux ordures ménagères. Leur mauvaise qualité globale et la concurrence tarifaire des vêtements neufs empêchent en effet bien souvent leur revente ou leur réutilisation. Moins de 1 % des tissus qui composent nos vêtements sont effectivement recyclés pour en faire de nouveaux. Les textiles dits recyclés sont en fait plutôt orientés vers d’autres filières industrielles, comme pour la fabrication d’isolants ou de rembourrages.
Nos vêtements finissent donc généralement leur vie en étant incinérés (dégageant alors des substances chimiques nocives), enfouis, ou bien dans des décharges à ciel ouvert polluantes. C’est le cas par exemple dans le désert d’Atacama au nord du Chili, considéré comme un « cimetière de vêtements » qui proviennent de partout dans le monde.
Sources des chiffres cités : La mode sens dessus-dessous et Le revers de mon look (Ademe).
Un modèle néfaste pour l’humain
Des conditions de travail dénoncées
Pour proposer des vêtements à bas prix, les marques de fast fashion produisent dans des pays où la main d’œuvre n’est pas chère, notamment au Bangladesh ou au Pakistan. Les conditions de travail y sont régulièrement dénoncées. Rémunération des travailleurs indécente, cadences de travail infernales, manque de sécurité, pressions quotidiennes, précarité, travail des enfants et travail forcé illustreraient un véritable esclavagisme moderne.
Plusieurs exemples témoignent de ces conditions :
- L’effondrement des ateliers de confection du Rana Plaza en 2013, faisant plus de 1 100 morts.
- Au Bangladesh, le salaire horaire est le plus bas au monde : 0,32 cents US$, pour ce pays qui envoie 59% de ses exportations textiles vers le marché européen. Et ce n’est guère mieux du côté du Pakistan, où le salaire est de 0,55 cents US$ (source : La mode sens dessus-dessous).
- En 2016, une étude de l’Overseas Development Institute affirme que 15% des enfants entre 6 et 14 ans vivant dans les bidonvilles de Dacca (capitale du Bangladesh) travaillent 64 heures par semaine dans l’industrie textile. La proportion monte à 50% chez les enfants de 14 à 16 ans (source : Capital).
- Le rapport Business & Human Rights Resources Center de 2022 indique que harcèlement moral et agressions sexuelles font partie des moyens de pression utilisés sur les employés de l’industrie textile.
De nombreux problèmes sanitaires
Les travailleurs sont directement exposés aux produits chimiques utilisés tout au long du cycle de vie d’un vêtement, et ce, souvent sans protection. C’est le cas par exemple avec le sable à haute pression utilisé pour décolorer les jeans. Il contient de la silice provoquant de graves maladies pulmonaires en cas d’exposition prolongée.
Comme nous l’avons vu, ces substances toxiques sont rejetées dans l’environnement, créant aussi des problèmes de santé humaine. En Indonésie, le fleuve Citarum dans lequel sont jetées les eaux usées de plusieurs centaines d’entreprises textiles est le plus pollué au monde. Or, ce cours d’eau est une source d’irrigation et d’eau potable pour la population. L’enquête diffusée dans les documentaires « Vert de rage » en 2019 indique que plus de 54 polluants différents ont été détectés dans les cheveux de plusieurs enfants vivant dans ces zones (source : GEO).
Enfin, les consommateurs sont également exposés aux produits toxiques. Au Canada, des scientifiques ont découvert qu’une veste pour enfant Shein contenait près de 20 fois la quantité de plomb que Santé Canada juge sécuritaire pour les enfants.
Des produits de mauvaise qualité
La réduction des coûts passe aussi par le choix de matières premières de mauvaise qualité. Les finitions sont moins solides, les tissus sont plus fins, moins résistants aux lavages et au temps. Les vêtements de fast fashion répondent donc à une vraie obsolescence programmée, puisqu’ils ne peuvent généralement pas être conservés sur du long terme, forçant leur renouvellement.
Contenu rédigé par Marion Mesbah
Après plusieurs années d’expérience dans le milieu du web, surtout comme rédactrice, Marion continue à écrire sur des sujets qui la passionnent : les plantes, les animaux de compagnie, mais aussi la consommation responsable.Ayant gardé la capacité d'émerveillement d'un enfant de 6 ans, elle est systématiquement fascinée par la moindre couleur, texture, faune ou flore offerte par la nature. Et c'est entre autres pour tenter de préserver cette beauté fragile qu'elle est convaincue que nous, humains, devons modifier notre façon de consommer. Acheter en conscience, privilégier la qualité & la durabilité, se tourner vers le local,… autant de pistes qui, si elles ne sont pas parfaites, permettent de tendre vers une plus grande frugalité.
J’ai assez souvent acheté des vêtements par correspondance à Atlas for Men ou l’Homme Moderne, sur catalogue: des prix bas (pour Atlas seulement), mais surtout la possibilité de trouver des articles difficilement disponibles en boutique (pantalons en flanelle ou velours côtelé, pulls sans manche…). J’y ai trouvé de la bonne qualité (pour L’Homme Moderne), de la practicité à prix modique (sur Atlas: blousons, gants, casquettes, pantoufles…). Ces marques font-elles partie de la “fast fashion” aujourd’hui tant décriée ?